Solidarité

Par Raphaëlle Duchemin, le 8 mars 2024

Journaliste

Marie-Laure Guidi, présidente de la Fondation de Marseille

Marie-Laure Guidi veut rassembler les forces vives de la cité phocéenne et soigner ses fractures ©DR
[Héroïne du quotidien] C’est à se demander à quoi elle carbure : quand on lui pose la question Marie-Laure Guidi éclate de rire et répond que c’est sa ville qui la nourrit. Cette expert-comptable est aujourd’hui à la tête de la Fondation de Marseille et du collectif Marseille au Pluriel, dont les moteurs sont le lien et la solidarité.
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Elle a grandi dans le quartier de La Pomme avant de déménager à Aubagne avec ses parents. « Mais je ne l’ai jamais quittée, jure-t-elle. Elle est ma passion ». Cette touche-à-tout aurait pu être musicienne, mais pour poursuivre une carrière de violoncelliste, il aurait fallu partir. Pas question. Alors la jeune femme continue ses études et choisit de se consacrer aux chiffres. En 2005, elle crée un cabinet d’expertise comptable, Innova tech, rebaptisé Ioda consulting en 2015 : avec pour ambition « d’apporter, explique-t-elle, un service dans la gestion et la finance aux entreprises innovantes de mon territoire, d’être une sorte de guichet unique. »

C’est de cette manière qu’elle entre à la French Tech, mais aussi à la chambre de commerce Marseille Provence. Puis qu’elle décide de prendre la tête du réseau BPW (Business and professional women) dans le sud, pour défendre la place des femmes. Boulimique ? « Non, assure-t-elle. J’ai juste une énergie hors norme, et je la mets au service des choses qui me semblent importantes. « Tout est lié, autour des mêmes valeurs, poursuit-elle. Faire grandir mon territoire. »

Une Biennale des Femmes de la Méditerranée

C’est aussi parce qu’elle croit en sa ville qu’elle a accepté de reprendre les rênes de la Fondation de Marseille, à la suite de Fabrice Nécas. Son objectif ? « Devenir la fondation de tous les entrepreneurs marseillais qui eux-mêmes n’ont pas de fondation. Et d’ici trois ans lever un million d’euros. » Elle est confiante Marie-Laure : « Le monde économique doit s’investir pour résorber les fractures. »

Ces fractures, elle veut aussi les réduire grâce à MarseilleS – Marseille au pluriel, son tout nouveau combat. Ce collectif inédit, lancé en octobre 2023 rassemble les forces vives de la cité phocéenne. Des universitaires, journalistes, chefs d’entreprise soucieux de lutter contre les scissions et divisions au sein de la société marseillaise. Il se lance de belle manière, avec une Biennale des Femmes de la Méditerranée. L’événement réunira au Mucem plus de 300 personnes, dont 100 Marseillaises venues de tous horizons, autour des valeurs centrales de cohésion.

Le principe, là encore : utiliser la force des valeurs centrales de cohésion au service de la ville pour renouer des liens. Pas étonnant quand on sait que la quinquagénaire fréquente depuis ses 14 ans, les gradins du Vélodrome, le lieu pluriel de la ville par excellence.

À propos de la Fondation de Marseille

Elle est activée le 12 février 2020 par un quatuor de « philentrepreneurs », cette génération de philanthropes qui a le cœur sur la main et l’œil sur les finances. Tous ont des accointances avec l’engagement social et des envies de société plus solidaire. En la matière, dans leur ville de Marseille, il y a fort à faire.

Ils ont à peine le temps d’exposer leurs ambitions et leur modèle (un outil financier neutre, non politique et laïque ; des solutions innovantes et solidaires pour encourager l’égalité des chances ; la recherche d’un retour social sur investissement) que le coronavirus déferle. Très vite, devant l’ampleur de la crise sanitaire, éducative, alimentaire et sociale liée à la pandémie, ils décident de se focaliser sur les urgences. Ils lancent alors #MarseilleSolidaire, investissent 15 000 euros dans l’opération, activent tous leurs réseaux au sein du monde économique et au-delà. Pour accélérer les actions solidaires qui fleurissent et éviter une catastrophe humanitaire dans certains quartiers.

Marie-Laure Guidi, présidente de la Fondation de Marseille 1
À l’occasion du gala de la Fondation de Marseille ©DR

Lever un million d’euros sur la période 2023-2026

Depuis 2020, plus de 640 000 euros ont été levés et redistribués.

L’an dernier, le COMEX a été renouvelé, et Marie-Laure Guidi a été élue présidente de la Fondation de Marseille. Ambitieuse, la feuille de route 2023-2026 vise des levées de dons encore plus importantes. Mais aussi un soutien plus ciblé sur des projets associatifs marseillais à impact. Elle s’assortit d’un objectif de collecte d’un million d’euros sur la période. Sachant que 180 000 euros de promesses de dons ont été faites dans le seul cadre de la première soirée « À jamais solidaires ! » du 20 février dernier (en partenariat avec IForce).

Les actions actuellement accompagnées sont 100% marseillaises et engagées contre les inégalités sociales, éducatives et culturelles. La promo 2024 compte ainsi Le Grand Bain Marseille (CitizenCorps), Action Bomaye, Les Toi’ts théâtre (Agence de Voyages Imaginaires), Le Food Truck des Tatas du cœur (Les Femmes du Plan d’Aou en action) et L’École du MauMa (Méta 2).

Rassembler les acteurs du territoire dans un élan collectif

Plus généralement, la Fondation de Marseille souhaite être un outil pour les PME qui recrutent et ont envie de faire évoluer le territoire. « Les grands groupes aussi peuvent nous rejoindre même si, souvent, ils disposent déjà de leurs propres outils. Il serait cependant dommage d’être concurrents dans ce monde-là, d’éparpiller les forces », pointait déjà Fabrice Necas.

Au-delà du soutien financier, la fondation table aussi sur l’importance du réseau de ses 90 donateurs pour accompagner ou conseiller les porteurs de projets. « Un prolongement naturel des activités pour un entrepreneur qui a réussi », souligne Marie-Laure Guidi. Elle reste convaincue que l’entreprise a un rôle social à jouer sur son territoire au service de l’intérêt général. D’où le développement d’autres formes de soutien auprès des acteurs associatifs de Marseille, comme le mécénat de compétences. ♦