Économie
Silibiliz met en sac bâches publicitaires et liners de piscine
Alan Albert a imaginé une gamme de sacoches et de bagagerie coupée et cousue dans les toiles publicitaires des stades qu’il a fréquentés lorsqu’il entraînait les sportifs de haut niveau. Difficilement recyclable, le matériau de base de son entreprise Silibiliz aurait fini à l’enfouissement sans ses ingénieuses créations.
Dans une première vie, Alan Albert officiait dans le sport. Plus précisément dans le handball, comme entraîneur et préparateur physique. Et pas pour n’importe qui puisqu’il s’occupait de joueurs de première division. D’abord à Nantes, puis à Montpellier. À l’époque, les stades et les gymnases étaient sa seconde maison, mais il ne savait pas encore qu’il allait y trouver la matière première qui deviendrait le fer de lance de sa prochaine vie.
Le potentiel de bannières publicitaires encombrantes
Un jour pourtant, le passionné de sport a réalisé tout le potentiel des bannières publicitaires déployées le long des terrains et des gradins. En général, ces bâches y sont installées pour une saison puis finissent, faute de mieux, à l’enfouissement avec toutes les conséquences que cela induit. C’est la même chose pour les banderoles événementielles que l’on voit sur les ronds-points, les toiles de camions ou les liners de piscine, une fois jetés.
« C’est un matériau composite, fait en principe de PVC dans lequel on trouve du coton ou du polyester. Séparer ces diverses matières est compliqué donc ce n’est pas recyclable tel quel », explique Alan Albert.

Très sensibilisé à l’environnement, il commence à réfléchir au réemploi de ces diverses toiles encombrantes et polluantes pour les transformer en sacoches. « J’avais en tête de créer un cabas de courses à roulettes plus moderne que ce qui existait jusqu’alors », témoigne-t-il. C’est ce qu’il va faire en croquant l’ébauche d’un chariot à plusieurs compartiments, qui dépoussière le classique sac de courses roulant, indissociable de la panoplie de nos grands-mères.
Des ateliers qui emploient des personnes en insertion
Son cabas aura une armature en bois recyclé, pliable, ainsi que des sacs colorés cousus dans la bâche. Modulables, ils séparent les aliments et évitent l’écrasement des produits les plus fragiles comme les fruits et les œufs. Détachables, ils peuvent aussi s’agripper au porte-bagage d’un vélo. Ingénieux. Pas idiot non plus le nom de ‘’Silibiliz’’, entreprise qu’Alan lance en 2022. C’est la contraction revisitée de deux termes anglais ‘’silly’’ et ‘’billy’’, qui une fois rassemblés signifient ‘’dingo’’ ou encore ‘‘farfelu’’. « J’aimais bien ce côté diablotin, et puis c’était pour rendre hommage à ma compagne irlandaise qui me soutient ».
Un peu ‘’foufou’’, diront certains, de miser toutes ses économies et son énergie dans la confection d’un cabas amovible. Mais Alan Albert croit dur comme fer en son idée. Il lance une campagne participative de financement sur Ulule et récolte ainsi quelques fonds et des commandes. Son garage lui sert à la fois de pièce de stockage, de centre de nettoyage et de découpe des pièces. Il s’y emploie seul. « Je délègue l’assemblage et la couture, compétences que je n’ai pas ».

Le matériau récupéré est résistant, imperméable, facile à nettoyer, malléable. Malaisé à piquer toutefois. « Il faut des machines à coudre à triple entrainement pour traverser les grosses épaisseurs ». Et trouver des ateliers à proximité de Montpellier pour éviter les trajets consommateurs d’énergie et ravageurs pour la planète. « À être écoresponsable, autant l’être jusqu’au bout, même si fabriquer français et local a un coût. Par ailleurs, il me semblait logique de faire travailler des personnes en insertion », commente le créateur, qui collabore avec des ateliers dont c’est la priorité.
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Des housses de protection écolo et durables envisagées à la demande
Une fois son cabas lancé, le chef d’entreprise imagine toute une gamme de petite bagagerie et autres sacoches pour se diversifier. Toujours en bâches recyclées. Il élabore aussi à des solutions de housses de protection à la demande. « Il y a un marché. Oc’Consigne, une jeune entreprise héraultaise de réemploi de verre, très sensible à l’environnement, m’a sollicité pour élaborer de quoi couvrir les palox qui contiennent les bouteilles collectées ».

Alan Albert ne compte pas les heures passées à ses inventions qu’il souhaite les plus vertueuses possible. « Je ne tire aucun salaire donc j’ai repris un emploi à plein temps et je mène tout de front, confie-t-il, sans se plaindre pour autant. C’est plus important pour l’instant de rémunérer les personnes en insertion qui collaborent avec moi ». Dans son carnet de commandes, l’attendent 600 sacoches à livrer, quelques colis à expédier contenant, notamment, son sac de plage. D’ailleurs, ce dernier pourrait bien gagner le littoral d’autres mers que la Méditerranée…
Depuis peu, Silibiliz a rejoint l’incubateur Innovosud à Béziers afin d’être accompagné dans sa phase d’accélération et de maîtrise des process pour gagner en efficacité et lever des fonds. Alan Albert se penche sur un prototype de cabas dont le prix d’achat sera plus accessible pour le client. « Il aura une armature en acier et des sacs repensés pour un montage moins compliqué donc plus rapide. Par ricochet, le coût de fabrication sera moins élevé ». ♦