Agriculture
Mouton Cadet s’engage dans Fair for Life
L’une des principales marques de Bordeaux vient de rejoindre le label Fair for Life qui certifie le commerce équitable et le développement durable d’une entreprise. Un pari ambitieux pour la marque du groupe Baron Philippe de Rothschild qui travaille avec 150 vignerons.
Quand une grande marque comme Mouton Cadet s’engage dans un label, il ne peut que gagner en crédibilité. Et le label, en visibilité. Ce qui en fait une démarche gagnant-gagnant au profit du développement durable. Fair for Life, FFL pour les intimes, est avant tout un outil de commerce équitable. Il aide les acteurs à investir dans le progrès social et environnemental et à agir de manière responsable.
Les débuts de Fair For Life dans le domaine des vins
Ecocert, organisme certificateur de la filière bio en France, s’occupe de son cahier des charges depuis 2014. 80% de la production labellisée Fair for Life est d’ailleurs issue de l’agriculture biologique. Mais si FFL a remporté un franc succès dans la filière agroalimentaire, il n’en est qu’à ses débuts dans la filière viticole. Les pionniers en la matière ont été les Vignobles Gabriel & Co, groupement de producteurs du Bordelais. C’est d’ailleurs en les rencontrant que les dirigeants de Mouton Cadet se sont intéressés à la démarche. <!–more–>
Il s’agit d’un objectif ambitieux pour la marque pilotée désormais par Philippe Sereys de Rothschild. Elle pèse 5,2% des bordeaux génériques en grande distribution, plus de 17% de parts de marché en valeur et environ 8 millions de bouteilles commercialisées chaque année. L’audit Ecocert a validé la certification Fair for Life à partir du Mouton Cadet 2022. Il arbore donc sur son étiquette le petit logo rectangulaire.

Une démarche structurante et un état d’esprit
« Nous étions depuis 2021 le premier vignoble bio, avec aujourd’hui 30% de nos surfaces converties (sur un total de 1500 hectares) », récapitule Véronique Hombroekx, directrice générale des vins de marque Baron Philippe de Rothschild. « En 2023, nous avons suivi la démarche de Cultivons Demain de l’interprofession des vins de Bordeaux, un outil de diagnostic de la RSE pour mieux nous structurer. Et nous réfléchissions à créer notre propre label. En échangeant avec Jean-François Réaud, à l’initiative du dossier pour les Vignobles Gabriel, nous avons compris que Fair for Life était un véritable état d’esprit ».

Au cœur de la démarche, l’humain, l’environnement et l’éthique. Fort d’une collaboration avec 150 vignerons travaillant sur 1500 hectares, l’enjeu repose sur la transition et la transmission « Le vignoble bordelais va plutôt mal. Et si l’on ne s’intéresse pas à l’évolution du métier, on ne le transmettra pas. Il ne s’agit pas seulement de suivre un cahier des charges, mais d’être dans une amélioration continue des process, des relations au quotidien, et bien sûr de la qualité des vins ». Pour cela, Mouton Cadet s’est engagé sur un prix rémunérateur pour ses partenaires (entre 30 à 50% de plus que le prix moyen du vrac de bordeaux), sur des contrats à long terme, de trois à cinq ans, sur le respect de l’environnement et des droits sociaux. FFL implique également un impact local positif et mesurable.
♦ (re)lire : Gabriel & Co, premier domaine viticole Fair for Life
Un fonds pour des projets de développement
La gouvernance doit être démocratique et le financement permettre les projets futurs. Une association est en charge du fonds de développement, alimenté par 1% des royalties de Mouton Cadet. Soit un budget de 121 000 euros en 2024. Elle identifie des projets de développement en accord avec l’ensemble de la communauté. Parmi ceux déjà votés, une étude sur les coûts de production qui devrait aboutir à terme à une mutualisation de matériel et de main d’œuvre ; des travaux de R&D pour réduire les risques climatiques, en particulier de gel ; l’investissement dans du matériel comme des pulvérisateurs confinés (avec récupération des produits de traitement), et dans la confusion sexuelle, outil de biocontrôle du vignoble, pour lutter contre les ravageurs de la grappe.
Un guichet unique devrait aider les vignerons et faciliter leurs démarches dans la jungle administrative. Des actions d’éducation dans les écoles ont par ailleurs été mises en place pour sensibiliser et transmettre le métier, donner envie aux jeunes de s’installer.
Un duo de la vigne au chai
En 2021, Stéphanie Chollet de la Closerie d’Elle s’est installée à Margueron (33), sur une trentaine d’hectares labellisés aujourd’hui HVE4 (Haute Valeur Environnementale). Une reconversion professionnelle à 47 ans qui s’appuie sur le partenariat avec Mouton Cadet. « Le cahier des charges est exigeant mais structurant et rassurant, avoue la jeune vigneronne. Avec Andréa Tempesta, le technicien de la maison, on se voit toutes les semaines, tous les jours même en période de vendanges. On partage tout, y compris le stress quand la météo est mauvaise. Nous formons un vrai duo, de la taille à la vinification. Il est pour moi un ange-gardien qui m’apprend énormément ».

Une équipe de sept œnologues assure le suivi de tous les travaux, de la vigne au chai, pour les partenaires du groupe. Ils fournissent de précieux conseils qui aident également les vignerons à élaborer leurs propres vins. Car la plupart de ces derniers ne sont pas en apport total de vins. « Nous vinifions avec eux, mais dans leurs installations pour conserver le caractère de leur terroir », précise le directeur des vins Mouton Cadet, Jérôme Aguirre. Ils bénéficient donc de notre R&D et de l’assistance technique pour valoriser leurs bouteilles ». D’où une fidélisation importante : 70% des vignerons travaillent avec Mouton Cadet depuis plus de neuf ans.
Aider les vignerons couteaux suisses
L’objectif final est d’améliorer toujours la qualité des vins et la qualité de vie des vignerons. « Ils sont aujourd’hui de vrais couteaux suisses, à la fois agriculteurs et chefs d’entreprise qui doivent apprendre à gérer les risques, estime Jérôme Aguirre. Notre but est de les aider à garder le savoir-faire et à faciliter les transitions et la transmission ». Ceux qui s’engagent dans la conversion bio peuvent profiter de contrats à cinq ans. « Nous les accompagnons un peu plus au démarrage pour qu’ils n’abandonnent pas, car la bio dans la région n’est pas évidente », souligne encore le directeur. « Mais il ne s’agit pas, au vu de la crise actuelle du bio, d’inciter tout le monde à la conversion. Le vigneron doit être prêt mais aussi ses équipes et il doit avoir réfléchi à un modèle économique ».
Si Fair for Life se révèle une véritable référence en matière de RSE et de transition environnementale, Jérôme Aguirre estime qu’il ne représente qu’une partie de la vision du groupe viticole. « Il faut réfléchir toujours plus loin. Aider chacun à faire un pas de plus pour améliorer les performances et maintenir les rendements avec une vision à 360° de l’homme dans la nature. Ce n’est pas une grande révolution en soi mais une évolution suivant le bon sens paysan pour réduire au maximum les risques de la production ». Et soutenir le vignoble de Bordeaux autant que la marque. ♦
