Le sport pour inculquer de bonnes valeurs aux jeunes

Par manque d’infrastructures ou de moyens, les habitants des quartiers prioritaires ont plus de difficultés que les autres à accéder à une activité sportive. Une inégalité que Sport dans la Ville s’évertue à réduire depuis près de 30 ans en construisant des terrains de sport libres d’accès. Des équipements dont l’association profite pour transmettre aux jeunes des valeurs qui leur serviront dans leur vie professionnelle. Reportage à Marseille.

Tous les mercredis après-midi, c’est le même rituel pour Syrine et Jessim. Les deux minots du quartier populaire de Frais Vallon, 11 ans chacun, jouent ensemble au foot. Non pas dans un club, mais au terrain de sport de leur quartier, aménagé il y a cinq ans par l’association Sport dans la Ville. Des animateurs, présents deux fois par semaine, assurent des séances de sport, centrées ici sur le foot, destinées aux jeunes de 6 à 25 ans. « On n’est pas un club de sport, mais on fonctionne comme tel », cadre d’entrée de jeu Valérie Martin, la directrice de l’antenne Sud. À savoir que chaque session se compose de jeux et d’exercices pour gagner en technique. « On profite du sport pour transmettre aux jeunes les savoir-être dont ils auront besoin dans leur vie future », ajoute la responsable.

Véhiculer des messages

Démonstration en ce dernier mercredi d’avril. Sous un soleil radieux, les groupes d’enfants et d’ados se succèdent sur le terrain au fil de l’après-midi. Ils sont répartis par tranches d’âge et cette catégorisation est déjà un apprentissage en soi. Car certains amis se retrouvent séparés, ce qui génère certaines frustrations. Pas de dérogation possible pour autant. « C’est une façon de leur montrer qu’il y a des règles à respecter et qu’on ne peut pas toujours faire ce que l’on veut », souligne Sophie Duparc, responsable des partenariats entreprises et de l’événementiel au sein de l’association.

Pendant les créneaux d’une heure et quart, deux animateurs encadrent les groupes. « Le niveau variant d’un enfant à l’autre, il faut proposer des jeux où tout le monde s’amuse. Je les imagine de sorte qu’ils soient techniques et ludiques tout en véhiculant des messages : solidarité, travail d’équipe, respect des règles, dépassement de soi… », explique Nassim, en poste depuis la création du terrain de Frais Vallon en 2020. Ancien footballeur, il sait trouver les bons exercices et les adapter à l’âge des jeunes. Notamment en s’inspirant des contenus qu’il regarde sur internet.

Ce qui plaît visiblement aux principaux intéressés, dont Jessim. « Je fais aussi partie d’un club de foot et c’est pas la même ambiance. Là-bas, on s’entraîne pour les matchs et quand tu fais une faute, ils (ndlr : les entraîneurs) s’énervent. Alors qu’ici, on joue pour le plaisir et avec les copains », apprécie ce fan de l’OM et du Real Madrid. Un avis partagé par Syrine qui est même inscrite à un second créneau le samedi. Pourtant, elle n’aspire pas à une carrière pro comme son camarade !

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Accompagner les jeunes

Construire des terrains pour permettre aux jeunes des quartiers prioritaires de pratiquer du foot, du basket, du rugby ou encore de la boxe, a été la mission première de la création de Sport dans la Ville, en 1998 à Lyon (lire bonus). Dans ces territoires, un jeune sur trois à un niveau inférieur au BEP ou au CAP. Et tous sont confrontés à un accès inégal aux diplômes et à la formation, combiné bien souvent à d’autres difficultés (mobilité, logement, famille, etc.)

C’est pourquoi des programmes d’accompagnement ont progressivement été imaginés. Comme « Job dans la Ville », l’un des plus emblématiques. Son but : accompagner les plus de 14 ans dans leur orientation professionnelle, leur accès à la formation ou à l’emploi. Ils sont pour cela suivis tout au long de l’année par un responsable insertion et un parrain ou une marraine. En parallèle du sport, qui reste partie intégrante du cursus et s’immisce même là où on ne l’attend pas. « On a récemment organisé un job dating à Frais Vallon qui a démarré par une session de sport en groupes, mêlant jeunes, partenaires et entreprises. Ça a permis de lever des barrières. La session de recrutement n’aurait pas été pareil sans ce moment », assure Valérie Martin.

Parmi les autres programmes (bonus), « L dans la ville » est né du constat qu’à partir de 12 ans, les jeunes filles ne sont plus assez présentes sur les séances sportives de l’association. Des créneaux leur sont donc désormais réservés, avec des activités et un encadrement spécifiques. L’objectif derrière est de déconstruire les stéréotypes genrés dans le monde professionnel, favoriser plus de mixité dans le cadre sportif et leur montrer que tout est possible.

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Multiplier les centres

Cinq ans après avoir investi le terrain de Frais Vallon, Sport dans la Ville est une structure connue et reconnue du quartier. Pour preuve : les enfants se réinscrivent aux programmes de sport d’année en année. Et, aux petits devenus grands, succède généralement le reste de la fratrie. Lorsque l’espace n’est pas occupé par l’association, le gazon synthétique est en libre accès pour les habitants. « C’est pour eux que l’on construit les terrains, ils sont à eux », appuie Valérie Martin. Il faut compter entre 250 000 euros et 300 000 euros pour en sortir un de terre. Et tout autant chaque année en frais de fonctionnement, qui couvrent la masse salariale de l’association et l’entretien.

À Marseille, quatre autres centres ont depuis vu le jour au sein de l’antenne Sud (bonus). Le dernier en date, inauguré début avril, se trouve à Val Plan, également dans le 13^ème arrondissement de Marseille. Là, les jeunes disposent de deux terrains, pour le foot et le basket, plus celui pour la pétanque qui a été réaménagé. Des choix établis après concertation avec les habitants, pour que les infrastructures leur soient utiles. L’ambition de l’association pour la suite est « d’ouvrir au moins un centre par an sur la région, dont un à Nice à moyen terme », glisse Sophie Duparc. Pourque le sport gratuit et ses multiples bienfaits soient accessibles à encore plus de jeunes. ♦

* La Criée – Théâtre national de Marseille parraine la rubrique éducation et vous offre la lecture de cet article *

Bonus

[pour les abonnés] – Tous les centres Sport dans la Ville – Une- naissance en 1998 – Tous les programmes de l’association – <!–more–>

# Les centres dans le sud et comment s’inscrire – Outre Frais Vallon et Val Plan, il y a Consolat (3^e arrondissement), avec un terrain de basket et un multisports, et Aubagne (basket). Il suffit d’inscrire son enfant en ligne via le site de Sport dans la Ville : www.sportdanslaville.com. Ou de se rendre sur le terrain pour être accompagné dans la procédure d’inscription par l’un des animateurs.

# Une association nationale – Sport dans la Ville a été créée à Lyon en 1998 par Nicolas Eschermann et Philippe Oddou. Elle a ouvert sa première antenne en Île-de-France en 2012, puis celle du Sud sept ans plus tard. Il en existe actuellement cinq (Hauts-de-France et Nantes) pour un total de 80 terrains. Selon les lieux, on y pratique foot, basket, rugby, tennis, danse ou boxe. Près de 10 000 jeunes sont actuellement inscrits aux programmes sportifs.

# Les autres programmes d’accompagnement proposés – « Réussite dans la ville », accompagnement scolaire pour les élèves de primaire et du collège. « Séjours et expériences internationales », pour permettre aux jeunes de partir en vacances. « Entrepreneurs dans la ville », aide à la création d’entreprise.