Environnement

Par Agathe Perrier, le 15 août 2025

Journaliste

Des parcs pour protéger l’écureuil roux

L'écureuil roux - Sciurus vulgaris - fait partie de la famille des sciuridés © Pixabay

[bestiaire] Le nombre d’écureuils roux est supposé en déclin en France à cause notamment de l’urbanisation qui grignote son habitat ou des animaux domestiques qui le chassent. Pour les protéger, l’association SOS Écureuils Provence lui a dédié des espaces et aménagements dans des parcs. Et cherche des volontaires motivés à faire de même partout dans le pays. 

Il mesure une vingtaine de centimètres, a une queue presque aussi grande et touffue que lui et pousse de petits cris perçants. Signe distinctif : non pas sa fourrure flamboyante – qui peut être noire ou marron – mais son ventre tout blanc. L’écureuil roux est l’espèce d’écureuil propre à la France et plus globalement à l’Europe.

Bien que protégé par le Code de l’Environnement, il serait en déclin (le conditionnel est de mise puisqu’aucun recensement n’existe selon la LPO). Mais pour Laurent Cattanéo, il n’y a pas de doute. « On en comptait douze à Lambesc il y a deux ans. Aujourd’hui, on pense qu’ils ne sont plus que quatre », alerte-t-il. Afin de protéger les derniers spécimens encore en vie, il a créé l’association SOS Écureuils Provence. Et permis la création de plusieurs parcs aux écureuils dans le sud du pays.

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Laurent Cattanéo a fondé l’association SOS Écureuils Provence pour aider à protéger les écureuils roux en Provence mais aussi partout en France © Agathe Perrier

Aménagements « écureuils friendly »

Le premier à avoir vu le jour se situe donc à Lambesc, commune des Bouches-du-Rhône non loin d’Aix-en-Provence. Depuis fin 2022, diverses installations censées donner envie aux écureuils de s’y établir jalonnent ses 5,6 hectares. Principalement des nichoirs – « ils ont besoin de se cacher » – et des mangeoires. Les bénévoles remplissent ces dernières notamment de graines de tournesol – les rongeurs s’y servent et laissent les coques en signe de passage. Des écuroducs également : des cordes ou des passerelles de bois tendues entre deux arbres pour qu’ils traversent en toute sécurité, sans poser les pattes au sol. « Le premier mis en place n’a jamais servi car la corde choisie s’est révélée trop fine », se souvient Laurent Cattanéo. Remplacée par une plus épaisse, elle séduit désormais les sciuridés.

Des « zones de quiétude » ont aussi été aménagées. Délimitées par des barrières en bois, elles sont interdites d’accès aux êtres humains. La végétation y pousse à sa guise et des arbres donnant les fruits préférés des écureuils roux – châtaigniers, noisetiers, mûriers… – y ont été plantés. L’objectif est de varier les essences afin qu’ils puissent trouver de quoi se nourrir en autonomie. Ces zones se révèlent en plus propices à la protection et au refuge d’autres espèces, telles que les hérissons et toutes sortes d’insectes.

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Multiples menaces

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Plusieurs écuroducs ont été installés dans le parc des écureuils de Lambesc, avec des paniers à hisser où les rongeurs peuvent trouver de la nourriture © AP

Au total, l’association a permis la création de quatre parcs aux écureuils, avec le soutien des collectivités – les communes, mais aussi le Département des Bouches-du-Rhône et la Région Sud. Outre celui Lambesc, il en existe aussi deux à Salon-de-Provence et un à Rognes. « Ils sont importants car l’écureuil roux fait l’objet de beaucoup de menaces », souligne Laurent Cattanéo. L’urbanisation grandissante grignote petit à petit son habitat, lui qui fréquente toute sorte de boisement. Pour trouver de la nourriture, il s’aventure alors dans certains jardins, à la recherche des gamelles de croquettes qui peuvent y traîner. Et devient ainsi une proie pour les chats, malgré sa rapidité. Et lorsqu’il grimpe aux arbres pour visiter les nids, dans l’optique d’y dérober un œuf ou un poussin, certains oiseaux, notamment les pies, n’hésitent pas à l’attaquer.

Le petit rouquin subit en outre la pression d’autres espèces d’écureuils exotiques. Notamment de la part de son congénère gris. « Ce cousin d’origine américaine impose une concurrence alimentaire [et] transmet un virus mortel pour l’écureuil roux », indique France Nature Environnement (FNE). Il se différencie par sa couleur évidemment, et parce qu’il est plus gros et plus lent. Quant à l’écureuil de Pallas – dit aussi « à ventre rouge » – il fait l’objet d’un plan de lutte pour stopper son expansion et limiter les dommages qu’il occasionne. Ces atteintes sont d’ordre écologique puisqu’il est en compétition avec l’écureuil roux natif, a un rôle de prédation sur les oisillons et ronge l’écorce des arbres. Et d’ordre économique du fait qu’il grignote les câbles téléphoniques ou les systèmes d’arrosage.

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Il faut sauver le soldat rouquemoute

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Les nichoirs permettent aux écureuils de se cacher © AP

Mais après tout, pourquoi faut-il éviter que l’écureuil roux disparaisse ? Une question qui fait sourire Laurent Cattanéo. « Car il participe à replanter les arbres dans les forêts », glisse-t-il. Le petit rongeur consacre l’essentiel de son activité à la recherche de nourriture. Prévoyant comme il est, il constitue des réserves qu’il entasse dans un arbre creux ou qu’il enfouit dans le sol. Sauf qu’il en oublie certaines – ou n’a pas l’occasion de les récupérer – si bien que des arbres poussent naturellement. Et, à l’instar de n’importe quelle espèce, il fait partie de la chaîne alimentaire : si un maillon se perd, c’est l’équilibre dans son ensemble qui est en danger.

Le président de SOS Écureuil Provence invite ainsi toutes les bonnes âmes à prendre part à sa cause. « Je cherche des propriétaires prêts à installer chez eux un point de survie », indique-t-il. C’est-à-dire un abreuvoir, un panier à hisser, une mangeoire… L’association donne des conseils et peut participer financièrement – sachant qu’il ne faut compter qu’une dizaine d’euros pour ce type d’aménagement. L’appel est lancé à tous les habitants des Bouches-du-Rhône… et même au-delà. Laurent Cattanéo est en effet en train de créer une association nationale pour aider celles et ceux qui le souhaitent à monter leur structure localement. Avec « Les Amis Protecteurs des Écureuils », il pourra facilement partager ses bonnes pratiques dans toute la France. Pour que les petits sciuridés roux disposent de lieux propices à leur sécurité un peu partout. Pour que leur nombre ne décline plus et, au contraire, reparte à la hausse. ♦

*Cet article a été initialement publié le 20 mai 2024

Volontaire pour installer un point de survie ou devenir bénévole ? Contactez SOS Écureuil Provence : sos.ecureuil.provence@gmail.com ou via son site internet en cliquant ici.

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Exemples de mangeoires à installer dans son jardin © AP

Bonus

# Pour en savoir plus sur l’écureuil roux – La LPO (Ligue de protection des oiseaux) lui dédie une fiche sur son site internet. Il faut savoir que cette espèce est strictement protégée en France et en Europe, mais chassée en Chine ainsi qu’en Russie principalement pour sa fourrure.

# En Seine-et-Marne, un « hôpital » pour les écureuils roux – Il s’appelle le Refuge de l’Écureuil Roux. Il s’agit d’un centre de soins de la faune sauvage dédiée à ce rongeur. Son équipe accueille, soigne, réhabilite ces rongeurs orphelins en détresse ou les adultes blessés. Ailleurs en France, d’autres centres de soins dédiés à la faune sauvage peuvent prendre en charge les écureuils roux (liste à retrouver ici).