ÉconomieEnvironnement

Par Elisa Castel, le 4 février 2025

Journaliste

Pataclet ou le mécénat environnemental de proximité

L'association Pataclet unit les forces pour préserver les 700 kilomètres de littoral de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur, les 110 îles et les espaces marins du territoire. @ NaturDive - Samuel Jeglot

Il y a moins d’un an, le Conseil économique, social et environnemental (CESE) adoptait à l’unanimité l’avis « Renforcer le financement des associations : une urgence démocratique ». S’inquiétant de leur fragilisation avec une baisse de 41% de la part des subventions dans leur budget. Un constat général, évidemment valable pour les structures travaillant en faveur de la protection de l’environnement. Ce qui n’a pas échappé au Conservatoire du littoral et à la CCI Aix-Marseille-Provence, qui ont eux-mêmes créé une association pour les mettre en relation avec les entreprises du territoire, potentielles mécènes : Pataclet. 

Pataclet. Au premier abord, le nom de l’association peut paraître énigmatique. Mais point d’acronyme obscur dans cette appellation. Le pataclet, c’est tout simplement un petit sar qui vit en bancs. Une métaphore parfaite de l’association qui mise sur l’union des PME et des associations de proximité pour faire face à un grand enjeu : la préservation des 700 kilomètres de littoral de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur, des 110 îles et des espaces marins du territoire. « Selon les textes européens, il faut qu’on arrive à restaurer 30% des espaces naturels dégradés, terrestres et marins », recontextualise Fabrice Bernard, délégué aux relations internationales du Conservatoire du littoral.

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Pataclet est le fruit d’« un engagement conjoint » de la CCI AMP et du Conservatoire du littoral. @ Louis-Marie Preau – Conservatoire du Littoral

L’établissement public a choisi, avec la CCI Aix-Marseille-Provence, d’y contribuer en multipliant les « micro-projets » environnementaux à impact. Lancée en novembre 2024, Pataclet est le fruit d’« un engagement conjoint » résume Olivier Cèbe, élu CCI AMP chargé du projet. « On avait créé ensemble, avec l’Agence de l’eau Rhône Méditerranée Corse, ICO (Island Coast Ocean) Solutions (Ndlr : des ateliers pour faire émerger des actions de préservation des territoires côtiers, insulaires et marins). Puis on a continué à travailler sur ces questions. des entreprises nous ont sollicités, pour mettre certains de leurs moyens à disposition d’associations ou pour être guidées dans leur démarche RSE (responsabilité sociétale des entreprises). Elles voulaient donner du temps et de l’argent. Il fallait qu’on réponde à ce besoin

S’appuyer sur les PME

D’autant que les associations et ONG du territoire « sont de moins en moins dotées de ressources financières et humaines », souligne Fabrice Bernard. « On a phosphoré et Pataclet est né », conclue Olivier Cèbe. Le Conservatoire du littoral, qui connaît bien le tissu associatif, recense les besoins. Et la CCI AMP, qui représente 146 000 entreprises, source celles qui souhaitent apporter un soutien financier, matériel et/ou humain, puis les accompagne. Du choix de l’association aidée à la mise en place du partenariat.

C’est souvent une structure déjà identifiée, mais ça peut aussi être une structure contactée en fonction du type de projet que souhaite défendre l’entreprise. À moins que celle-ci préfère s’engager à verser une petite somme, chaque mois, à la « nurserie » de projets et prenne part à un financement collectif. «On ne cherche pas de grande entreprise parce que la somme des PME, si elles s’unissent, est supérieure», précise Olivier Cèbe. « Et une grosse société peut arrêter le mécénat du jour au lendemain », prolonge Fabrice Bernard. Les petits poissons font les grands bancs.

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Des rencontres et un site Internet

Fin novembre, de premières Rencontres Pataclet ont été organisées à la CCI AMP. @ François Moura
Une quarantaine d’entreprises ont ainsi pu découvrir autant d’associations et ONG lors des Rencontres Pataclet, en novembre 2024. @ François Moura

Fin novembre, de premières Rencontres Pataclet ont été organisées à la CCI AMP, avec le soutien de la Fondation MMA des entrepreneurs du futur et de la Région Sud. Une quarantaine d’entreprises ont ainsi pu découvrir autant d’associations et ONG. Dont six qui ont joué le jeu du « speed meeting ». Leurs projets sont désormais mis en avant sur le site pataclet.org, qui devrait bientôt en présenter une quinzaine d’autres. Parmi eux, l’aménagement durable de la maison des gardes de l’île du Grand Rouveau aux Embiez, un traitement magnétique de l’eau d’irrigation au Domaine du Rayol, la restauration de récifs coralligènes ou encore la sensibilisation des acteurs de l’observation des cétacés à un tourisme respectueux de ces espèces.

Tous ces projets nécessitent un financement compris entre 2 000 et 15 000 euros, du matériel et/ou des moyens humains. Des besoins listés avec précision, pour que les entreprises puissent les contacter. De leur côté, ces dernières peuvent également se présenter. Elles mentionnent leurs valeurs et ce qu’elles peuvent offrir : compétences, outils, matériaux ou budget potentiels. Pour être sollicitées. À moins que Pataclet ne joue les entremetteurs en coulisse.

Un premier duo constructif

île de grand rouveau
Parmi les projets mis en avant par l’association Pataclet, l’aménagement durable de la maison des gardes de l’île du Grand Rouveau, aux Embiez. @ Pataclet

Comme pour Lou Bonheur, qui développe les volets pédagogie et biodiversité de la ferme agroécologique Aïoli-Caganis à Martigues, dans les Bouches-du-Rhône. Elle va bientôt pouvoir réaliser une mare destinée « à diminuer la pression des prédateurs sur les cultures, notamment en attirant des chauves-souris et en favorisant la reproduction des amphibiens qui vont ensuite manger les limaces, par exemple », explique Vincent Rivière, membre de l’association chargé de ce projet. « On ne pouvait pas la financer on avait besoin d’un partenaire et on était en lien avec le Conservatoire du littoral. Ils ont tout de suite pensé à une entreprise de travaux publics qui cherchait un projet à forte plus-value pour la biodiversité, qui valorise ses compétences. »

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Cette entreprise, c’est Bronzo Perasso, qui produit du béton ainsi que des granulats, accueille et recycle des déchets du BTP. Elle va mettre à disposition des engins, des chauffeurs et probablement des matériaux. Une participation des plus naturelles selon Rémi Sarda, qui est référent environnement et relations avec le territoire de l’entreprise. « Ça nous paraît cohérent d’améliorer la biodiversité grâce à de petites opérations. C’est ce genre de démarche qui fait qu’on est un acteur local, et pas seulement un acteur économique. Ce qui ne nous empêche pas de participer aussi à des actions d’envergure internationale avec des ONG. Souvent, les acteurs économiques ne connaissent pas les acteurs associatifs, c’est la difficulté. Pataclet est un facilitateur. Une plateforme de rencontre. »

Qui pourrait enclencher des collaborations avec d’autres associations. « On est répertoriés sur pataclet.org et on consultera les projets au fur et à mesure de leur recensement. C’est vraiment une question d’opportunité », assure-t-il. Pour l’heure, ils sont six à attendre un mécène en ligne. ♦