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Comment Dispo Ménage booste les femmes éloignées de l’emploi
De quelle façon créer une dynamique durable d’insertion professionnelle pour les profils éloignés de l’emploi ? Dispo Ménage, startup à impact marseillaise est une des rares Entreprises d’insertion par le travail indépendant (EiTI) en France. Elle a déjà accompagné plus de 60 personnes sur le chemin de l’entrepreneuriat.
Elles sont 36 en France, et seulement cinq en Provence-Alpes-Côte d’Azur. Expérimenté depuis fin 2018, le statut d’Entreprise d’insertion par le travail indépendant (EiTI) peine encore à gagner le cœur des entrepreneurs de l’économie sociale et solidaire. « Davantage par méconnaissance que par désintérêt », juge Adrien Augusto, président fondateur de Dispo Ménage, l’un de ces acteurs, créée en 2021 à Marseille. Il organisait ce mardi 11 juin avec l’agence France Travail de la Belle de Mai (Marseille 3ème) une matinée d’information sur cette forme d’entreprise inclusive.
Facilité et juste salaire
Dispo Ménage est une plateforme de réservation de service et un tiers de confiance entre les employeurs (professionnels ou particuliers) et les aides ménagères indépendantes, inscrites au registre des services et du commerce. L’entreprise ne les emploie pas, mais facilite leur mise en relation et le paiement des prestations. « À leur juste prix », selon l’entrepreneur. Le concept plaît : il accompagne à ce jour 61 femmes de ménage pour 200 clients actifs dans les Bouches-du-Rhône. « Leur salaire moyen est 40 à 60% plus élevé que le smic horaire », poursuit-il.

Outre Dispo Ménage, quatre autres EiTI opèrent dans la région : Germinal, spécialisé dans l’accompagnement entrepreneurial personnalisé ; Linklusion, une plateforme de sous-traitance experte pour les travailleurs indépendants handicapés ; Le Propulseur, dernier-né des accélérateurs du groupe Staffme ; et la Coopérative d’Initiatives Jeunes Entrepreneur(e)s qui permet aux plus jeunes de tester leur projet en grandeur réelle. « Leur point commun est d’offrir une voie vers l’autonomie et l’épanouissement professionnel pour les personnes éloignées du marché du travail en combinant l’indépendance économique avec un soutien structuré », explique Adrien Augusto.
Autonomie épanouissante
Dans son dernier rapport, la fédération des entreprises d’insertion indique que le statut profite aujourd’hui à seulement 550 personnes sur les 76 960 salariés en parcours d’insertion. « Ce nouveau modèle vient compléter l’offre inclusive. Il répond à un réel besoin d’accompagnement de travailleurs indépendants fragiles », notent ses défenseurs.
Parmi les principaux avantages recensés figurent la souplesse d’adaptation du statut aux contraintes de situations personnelles particulières (familles monoparentales, handicap, seniors, réfugiés…) ou les rapports difficiles aux relations de subordination. « Nous accompagnons le retour à une autonomie durable et épanouissante », résume Adrien Augusto.
Oubliées les galères

Echata Mmadi en témoigne. À 42 ans, cette mère comorienne de cinq enfants flanquée d’un mari de vingt ans son aîné bouclait difficilement ses fins de mois avec un RSA et quelques activités glanées çà et là. Lasse de dépendre, elle a créé son autoentreprise de services de nettoyage, Kovenet. « J’avais du mal à trouver le temps de prospecter entre mes heures de ménage et l’entretien de ma propre maison », explique-t-elle. Sa rencontre avec Adrien Augusto a tout changé. « Il s’occupe de cette partie commerciale mais aussi des questions administratives. C’est un soulagement qui me permet de me consacrer entièrement à mon métier », poursuit la quadra. Son carnet de rendez-vous est plein et ses galères oubliées : le mois dernier, elle a facturé près de 4000 euros à ses clients.
Même parcours d’audace et de réussite pour Françoise Ruoppolo, passée du statut de salariée à 1200 euros mensuels à celui d’indépendante, payée le double pour moins d’heures. « Je suis plus libre, j’ai pris confiance en moi et désormais, je supervise d’autres femmes », raconte-t-elle de sa nouvelle vie professionnelle. Chez Dispo Ménage, elle est ambassadrice pour les conciergeries AirBnB où elle forme les intervenantes aux techniques de ménage très particulières qui sont réclamées pour les locations saisonnières.

Éloigner le rêve de Dubaï
Mais attention : tous n’ont pas la capacité à être son propre chef. « On défantasme le rêve de Dubaï », résume Donatienne de Barmon, responsable du Propulseur. Cet EiTI du groupe StaffMe dans les Bouches-du-Rhône a été créé en janvier 2023. « Notre rôle n’est pas que d’accompagner les « staffeurs ». Mais aussi de créer une dynamique durable d’insertion professionnelle pour les profils éloignés de l’emploi », poursuit-elle. Ainsi, la structure soutient activement vingt personnes à Marseille en jouant les intermédiaires avec près de 500 entreprises engagées pour l’inclusion.
Le Propulseur s’appuie sur les formations délivrées par le groupe, des parcours intensifs d’une semaine en cours du soir. Tous destinés « à acquérir des compétences concrètes et valorisables sur un CV », selon son cofondateur et directeur général Augustin Destremau. Son programme Entrepreneuriat a reçu l’an passé un millier de candidats. « Car il aide nos participants à se poser les bonnes questions », poursuit le patron social. À l’issue, la moitié environ plongeront vers l’indépendance. « C’est un choix difficile, reconnaît Echata Mmadi. Mais il me projette vers un meilleur avenir, plus sûr, plus confortable, loin de ma cité ». ♦